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Sécheresse en Algérie : des champs de céréales totalement desséchés

Sécheresse en Algérie : des champs de céréales totalement desséchés

Les images en provenance de Chlef, l’une des plus importantes régions agricoles en Algérie, montrent des champs de céréales totalement desséchés.

Les plants présentent des épis de taille réduite avec quelques grains de petite taille voire aucun. Les agriculteurs se posent la question de l’opportunité de faucher ces champs de céréales pour en récolter la paille.

La situation à Chlef rappelle celle de l’année passée : des champs de couleur jaune, totalement desséchés avant leur maturité, comme foudroyés subitement par la sécheresse.

Sauf que cette année, à Chlef, la sécheresse est arrivée plus tardivement et que le blé est à un stade plus avancé. Pour beaucoup d’agriculteurs, l’espoir était présent à quelques semaines de la récolte. Et la récolte de céréales de 2024 allait faire oublier la sécheresse qui a frappé l’Algérie ces dernières années.

À l’automne, ces agriculteurs n’avaient pu relancer un cycle de culture que grâce aux indemnisations des pouvoirs publics sous forme de gratuité des semences et des engrais. Mais le manque d’eau et les trop fortes températures auront stoppé la croissance des épis et réduit l’espoir des agriculteurs.

Algérie : la sécheresse frappe des champs de céréales à Chlef

Il aurait suffi d’une dernière pluie pour que les épis finissent de grossir et que la récolte paie les frais engagés, voire dégage un surplus financier. Des essais agronomiques ont montré que dans des conditions identiques, l’utilisation de variétés résistantes à la sécheresse ou d’un recours au semis direct sans labour permettent d’atténuer les effets de la sécheresse.

Ainsi, mieux valorisée, l’humidité du sol arrive à obtenir un minimum de récolte et permet donc de rembourser les frais de culture engagés par l’agriculteur.

Echourouk News TV a enquêté à Sendjas dans la wilaya de Chlef. Devant un champ de blé dont les plants arrivent à hauteur de genoux, un agriculteur saisit un épi et le frotte entre ses mains.

Après avoir soufflé pour éliminer les débris de glumes qui entourent les grains, il tend la main. Seuls quelques grains de taille réduite apparaissent. Ils devraient être bien plus nombreux et surtout plus gros. Marzouki Mansour, un de ses collègues, confie : « Dans les champs, les épis sont beaux, mais la plupart sont vides ».

Il se pose la question de récolter ses parcelles ou de les faucher pour en récupérer la paille afin de nourrir les moutons et cela avant d’éventuels orages.

Quelles sont les solutions pour faire face à la sécheresse ?

Plus loin, Kamel ne se pose plus la question. Ses brebis pâturent déjà un champ similaire. Déjà, en absence de cultures fourragères, les moutons affamés ont consommé la majorité du blé dont ne subsistent que quelques plants.

Dépité, il confie : « Il n’y a rien cette année. Il n’y aura pas de récolte. La taille des plants ne permet pas de les faucher, et cette parcelle ne convient qu’au pâturage ». Comme pour se justifier, il poursuit : « S’il y avait plus de paille, on l’aurait fauché. Ce n’est pas une année réussie ».

Dans la commune de Harchoun, même paysage de désolation. Partout entre les parcelles en jachère à la couleur marron, des parcelles de blé aux plants de belle taille mais déjà desséchés alors que les grains étaient en cours de remplissage. En bordure de son champ, Benmarim Benkhaled ne cache pas son désarroi et confie que : « Le service des assurances indique qu’il n’indemnise que les parcelles de céréales touchées par un incendie ou la grêle mais pas par la sécheresse ».

Déjà l’année dernière, dans son champ desséché, un agriculteur s’interrogeait : « Avec le risque de sécheresse doit-on continuer à essayer de produire des céréales dans cette région ? »

Mahiendine Kouadria, directeur de wilaya des services agricoles « estime que près de 50 % des parcelles sont concernées par la sécheresse. On se doit de trouver des solutions notamment par le recours à l’irrigation en augmentant les surfaces irriguées ».

« 27 communes de Chlef sont alimentées en eau potable à partir de la Station de dessalement d’eau de mer de Mainis (Ténés), tandis que huit communes du sud-ouest de la wilaya sont alimentées à partir du barrage de Sidi Yakoub, sis dans la commune d’Ouled Ben Abdelkader », soulignait le site DK News à la mi-janvier 2024. Comme dans les autres régions d’Algérie, le secteur agricole consomme 70 % des ressources en eau à Chlef. Est-il possible de lui allouer encore plus de ressources en eau ?

Dès 2012, l’agro-économiste Cherif Omari signait, en tant que co-auteur, une étude sur l’agriculture algérienne face aux défis alimentaires et se demandait alors : « Ne vaudrait-il pas mieux investir les dépenses liées aux importations dans l’amélioration des terres et de la production, même si les effets des investissements agricoles se feraient sentir à plus long terme ? »

La paille pour les moutons ou l’agriculture ?

L’amélioration des terres contre la sécheresse autrement que par l’irrigation reste un thème rarement évoqué en Algérie.

Récemment, un ingénieur agronome de l’Institut technique des grandes cultures (ITGC) a affirmé que la sécheresse n’est pas une fatalité et que « la matière organique dans le sol augmente la résistance du sol à la sécheresse ».

À l’appui, une photo d’une précédente sécheresse à Sétif. Celle-ci montrait que là où les engins de récolte avaient, en 2022, laissé de la paille au sol les plants de blé de l’année suivante étaient plus verts.

Pour beaucoup d’éleveurs comme pour Kamel qui fait pâturer sa parcelle sinistrée par les moutons, la paille présente un intérêt indéniable en élevage et il est absolument inenvisageable d’en enfouir une quelconque partie au sol. Pourtant à l’étranger, dans les grandes régions céréalières, les agriculteurs vont jusqu’à équiper leur moissonneuse-batteuse d’un broyeur de paille et la laisser au sol.

En Algérie, tout l’art de la recherche agronomique est donc de trouver l’adéquation entre l’utilisation de la paille pour maintenir la fertilité des sols et son utilisation en élevage du mouton. La focalisation des éleveurs sur la paille constitue un indicateur du déficit persistant en fourrages malgré les subventions publiques accordées à ce type de production.

En 2016, dans le quotidien El Watan, à propos d’autosuffisance alimentaire, l’agro-économiste Omar Bessaoud rappelait que selon l’Agricultural science and technology indicators, l’Algérie ne compte que 17 chercheurs (équivalents plein temps) pour 100 000 personnes engagées dans l’agriculture.

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