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Guerre Israël – Gaza : le rôle trouble de l’Égypte d’Al-Sissi

Guerre Israël – Gaza : le rôle trouble de l’Égypte d’Al-Sissi

L’Égypte, l’un des plus grands pays arabes et musulmans, adopte une attitude incompréhensible vis-à-vis de la guerre de Gaza qui se joue de surcroît à ses frontières.

Depuis le début de l’agression israélienne, non seulement le pays de Abdelfattah Al-Sissi n’utilise pas ses leviers de pression pour arrêter le massacre des Palestiniens, mais ses responsables multiplient les faits et déclarations qui s’apparentent au mieux à une neutralité par rapport à ce qui se passe dans la bande de Gaza, au pire à un soutien à Israël. Le Caire n’a pas même rappelé son ambassadeur à Tel-Aviv.

Contrairement aux pays de l’Amérique latine comme le Brésil et la Colombie ou d’Afrique comme l’Afrique du Sud qui ont dénoncé un génocide à Gaza, l’Égypte d’Al-Sissi peine à lever le petit doigt pour critiquer la politique du gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou et la guerre qu’il mène aux Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie.

La guerre du Kippour en 1973 est le dernier conflit armé qui a opposé Israël et l’Égypte. Après cette guerre, les Égyptiens se sont engagés dans un processus de paix qui a abouti, en 1978, aux accords de normalisation de Camp-David contre la restitution par Israël de la péninsule du Sinaï occupée à l’issue de la guerre des Six Jours en 1967.

Depuis, l’Égypte et Israël sont entrés dans une longue période de paix que même les massacres en cours en Palestine ne perturbent pas.

En quatre mois et demi, l’armée israélienne a tué près de 30.000 civils palestiniens, dont plus de 12.000 enfants.

Comme d’autres pays de la région et du monde, l’Égypte a appelé à un cessez-le-feu, sans autre action ferme à même d’infléchir l’intransigeance du gouvernement israélien d’extrême-droite, officiellement déterminé à détruire le Hamas jusqu’au dernier combattant après l’attaque spectaculaire du 7 octobre dernier.

Le Caire n’a jamais porté dans son cœur le mouvement palestinien, issu de la mouvance des Frères musulmans, au même titre que l’ancien président égyptien Mohamed Morsi, destitué par un coup d’État en 2013. Néanmoins, la coopération étroite et la bonne entente entre le Caire et Tel-Aviv est antérieure à cet événement.

Depuis le déclenchement de la guerre en cours, la seule fois où l’Égypte s’est opposée fermement au gouvernement israélien, c’est lorsque celui-ci a envisagé de déplacer la population de Gaza vers le Sinaï égyptien.

Dans le monde arabe et musulman, l’Égypte est accusée de contribuer au blocus imposé à la bande de Gaza en maintenant un contrôle strict du passage de Rafah, l’unique porte qui relie l’enclave palestinienne au reste du monde.

Le 8 février, le président américain, Joe Biden, a surpris en révélant qu’il a dû insister auprès de son homologue égyptien Abdelfattah Al-Sissi pour le convaincre de laisser passer l’aide humanitaire aux Palestiniens. Ce que le Caire a démenti.

Lorsque le gouvernement israélien a fait part de son intention de lancer une offensive terrestre contre la ville de Rafah, sur la frontière égyptienne, où s’entassent dans des conditions inhumaines 1,4 million de réfugiés, l’Égypte n’a pas fait plus que les gouvernements occidentaux, se contentant de mettre en garde contre une catastrophe humanitaire de grande ampleur, sans autre forme de menace.

Guerre Israël – Gaza : à quoi joue l’Égypte ?

Dans la foulée, le Caire a acheminé des unités militaires supplémentaires vers la frontière avec la bande de Gaza, afin de faire face à un éventuel flux de réfugiés en cas d’attaque israélienne.

L’Égypte participe avec le Qatar et les États-Unis à la médiation visant à parvenir à un accord de cessez-le-feu et d’échange de prisonniers entre le Hamas et Israël.

Mais le fond de sa pensée vis-à-vis du mouvement palestinien a été trahi par son ministre des Affaires étrangères. Le 17 février, au cours d’une conférence à Munich (Allemagne), Sameh Choukri a été interpellé par l’ancienne ministre israélienne des Affaires étrangères, Tzipi Livni sur le Hamas.

La réponse du chef de la diplomatie égyptienne a été sans équivoque. « La paix est inenvisageable avec la présence du Hamas », a-t-il répondu, estimant que ce mouvement est en dehors de « la majorité acceptée du peuple palestinien et de l’Autorité palestinienne » et qu’il refuse de renoncer au soutien à la violence et de reconnaître Israël.

Le ministre égyptien a indiqué que ceux qui ont financé le Hamas pour diviser les Palestiniens doivent « rendre des comptes ».

Opposé depuis sa création en 1987 à toute reconnaissance du droit d’Israël à l’existence, le Hamas a toutefois changé de position à l’issue de son congrès à Doha en 2017 en acceptant la solution à deux États.

Si Choukri a dit le fond de la pensée du pouvoir égyptien vis-à-vis du Hamas, le président Abdelfattah Al-Sissi, lui, a levé les derniers doutes quant à l’attachement de l’Égypte avant tout à ses intérêts stratégiques et économiques.

Au cours d’un congrès international sur le pétrole tenu au Caire, lundi 19 février, Al-Sissi s’est plaint du recul « de 40 à 50 % » des revenus du Canal de Suez depuis que les Houthis du Yémen attaquent en Mer Rouge les navires ayant un lien avec Israël, en soutien aux Palestiniens de Gaza qui souffrent du blocus israélien. Le canal de Suez fait entrer à l’Égypte près de 10 milliards de dollars de revenus chaque année.

Les attaques des Yéménites, entamées le 19 novembre dernier, ont fait très mal à l’économie d’Israël qui a toutefois pu compter sur l’aide de trois pays arabes, les Émirats arabes unis, l’Arabie Saoudite et la Jordanie qui ont mis en place un « pont terrestre » pour acheminer les marchandises asiatiques des ports émiratis jusqu’au territoire israélien.

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