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Création de journaux en Algérie : la polémique sur les binationaux relancée

Création de journaux en Algérie : la polémique sur les binationaux relancée

Quelle place en Algérie dans la vie politique, médiatique, économique, culturelle et autre pour les Algériens qui détiennent la nationalité d’un autre pays ? La question revient régulièrement dans le débat.

Si le discours officiel leur fait toute la place voulue pour contribuer au développement et au rayonnement du pays, les choses ne sont pas toujours reluisantes sur le terrain. En août dernier par exemple, un nouveau texte de loi a privé les binationaux de la possibilité de créer un média en Algérie.

Le député de la wilaya de Djelfa Ahmed Rabhi a rebondi sur cette question, relevant une « dualité » et une « contradiction » dans l’arsenal législatif algérien.

Le parlementaire cite en exemple la star de football Riyad Mahrez. Celui-ci est le bienvenu quand il s’agit de défendre les couleurs nationales, mais il ne peut pas créer un média, ni même y participer comme actionnaire.

« Le joueur Riyad Mahrez, par exemple, joue en équipe nationale (…), mais dans la nouvelle loi sur la presse, il lui est interdit de créer un journal écrit ou électronique. Il n’est pas le bienvenu ici. La duplicité dans le droit algérien », a écrit le parlementaire au moment où l’APN examine le projet de loi relatif à la presse électronique.

La disposition a été introduite dans la nouvelle loi sur l’information promulguée en août dernier. Il y est exigé la nationalité algérienne exclusive pour toute participation dans le capital d’une entreprise médiatique, de la presse écrite audiovisuelle ou électronique.

Cette exclusion a constitué une surprise et un recul après plusieurs années d’avancées. La Constitution de novembre 2020 a en effet sauté le verrou de l’obligation de détenir la nationalité algérienne exclusive qui empêchait les binationaux d’accéder à des postes de responsabilité importants dans la hiérarchie de l’Etat. La disposition avait été introduite dans la révision constitutionnelle de 2016.

En janvier 2017, un décret présidentiel a arrêté la liste des fonctions interdites aux binationaux. Ainsi, pour devenir Premier ministre, membre du gouvernement, wali, président d’une chambre du Parlement, commandant militaire ou d’un organe de sécurité, il fallait attester par une déclaration sur l’honneur ne détenir que la nationalité algérienne. Pour accéder à l’un de ces postes, les binationaux devaient obligatoirement renoncer à leur citoyenneté étrangère.

Le football, meilleure illustration de l’apport des binationaux à l’Algérie

La disposition avait suscité un tollé chez la communauté algérienne établie à l’étranger, dont l’écrasante majorité se trouve en France et au Canada.

La décision avait été critiquée sur plusieurs aspects. D’abord, elle était pointée du doigt comme une discrimination entre les citoyens d’un même pays, en contradiction avec la disposition de la même Constitution qui stipule que tous les citoyens sont égaux en droits et en devoirs.

Chez les expatriés algériens, on avait dénoncé aussi une insulte à l’histoire, au vu de tout ce que les émigrés avaient apporté à la cause nationale, de la création du premier parti nationaliste algérien dans les années 1920, l’Etoile nord-africaine, à la guerre de Libération nationale.

Les plus pragmatiques avaient souligné que, dans un monde très concurrentiel, il n’était pas judicieux de se priver des compétences, prouvées du reste dans plusieurs domaines, d’une partie de la communauté nationale pour une telle raison.

Le député Ahmed Rabhi fait bien de citer le cas de Riyad Mahrez et à travers lui tous ses coéquipiers binationaux qui ont porté et qui portent encore haut les couleurs nationales.

L’exemple du football est la meilleure illustration des satisfactions que peuvent procurer à l’Algérie ses expatriés.

D’une équipe quelconque dans les années 1990 et 2000, l’équipe d’Algérie a été métamorphosée après l’adoption par la FIFA de la loi dite Bahamas permettant aux binationaux de changer leur nationalité sportive.

La loi a été inspirée par l’Algérien Mohamed Raouraoua. Ce qui s’est passé est bien simple : de jeunes binationaux qui ont eu la chance de fréquenter des centres de formation parmi les meilleurs au monde ont mis leurs compétences acquises au service de leur pays d’origine.

Des Mahrez, Aouar ou Bennaceur, il y en a sans doute dans les domaines, en nouvelles technologies, en recherche scientifique ou en affaires, en France, au Canada et ailleurs.

En juin 2020, le président Abdelmadjid Tebboune a nommé un binational au poste de ministre chargé de la Communauté nationale à l’étranger, le député de l’émigration Samir Chaâbna. Mais celui-ci a refusé de renoncer à sa nationalité française comme l’exige la Constitution de 2016, alors en vigueur.

Quelques mois plus tard, en novembre 2020, la disposition a été supprimée par la nouvelle loi fondamentale. La nationalité algérienne exclusive n’est plus exigée que pour accéder au poste suprême de président de la République. Et, depuis août dernier, pour être actionnaire d’un journal.

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